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Qu'est-ce qu'un manifeste, historiquement ?
Une déclaration, écrite, publique, pour exposer un programme ou une position. Politique et artistique communiquent ainsi. Même si, déjà au siècle précédent, le terme s'utilisa, c'est au XIXe qu'il prend son essor, quand "le mouvement ouvrier" essaye de s'extraire des exploitations. Le Manifeste du Parti communiste, de 1848, reste le plus célèbre, rédigé par Karl Marx et Friedrich Engels.
En 1828, Sainte-Beuve reconnaissait l'existence d'un premier "manifeste" : "Défense et illustration de la langue française", "La Deffence et Illustration de la Langue Francoyse", dans l'orthographe originelle de 1549, de Joachim du Bellay. Le premier manifeste ?
Néologisme pour le manifeste littéraire ? Quatre ans plus tôt, un certain A. Guiraud, avait publié "Nos doctrines : Manifeste de la Muse française." Puis un certain Nisard, publia en 1833 son "Manifeste contre la littérature facile."
En 1886, Jean Moreas publia "le Manifeste du symbolisme." Son « manifeste littéraire », publié dans le supplément littéraire du Figaro, fonda "le mouvement symboliste", qui déclarait rompre avec le décadentisme mais également le Parnasse.
C'est Filippo Tommaso Marinetti, avec son "Manifeste du futurisme" (janvier 1909 en Italie, février 1910 en France) qui lança vraiment le genre, en donnant naissance à "l'avant-garde" du XXe siècle. Futurisme : « La splendeur du monde s'est enrichie d'une beauté nouvelle : la beauté de la vitesse. Une automobile de course avec son coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l'haleine explosive... » Il multipliera les manifestes, comme le Manifeste technique de la littérature futuriste ou le Manifeste de la cuisine futuriste.
Puis il y eut le Manifeste DaDa, même les Manifestes DaDa, de celui rédigé par Hugo Ball en juillet 1916, en passant par "les Sept manifestes Dada" (1924), recueil de manifestes lus ou écrits entre 1916 et 1924 par Tristan Tzara ou "Dernier Relâchement, manifeste dada" de Walter Serner (1918).
Le manifeste exprime un désir de changement, la volonté d'une autre réalité, de ne pas subir un système figé, de briser les bâtons dans nos roues. Ce manifeste politico-littéraire s'inscrit naturellement dans l'Histoire des manifestes.
Il convient également de ne pas oublier, le "manifeste des 93", l'appel des intellectuels allemands aux nations civilisées, du 14 novembre 1914 ; le "manifeste des 121", sur le droit à l'insoumission dans la guerre d'Algérie, du 6 septembre 1960 ; le "manifeste des 343", pour le droit à l'avortement, du 5 avril 1971.
Christine Angot n'a pas encore signé de manifeste pour son genre littéraire. Oh quelle belle idée, va-t-elle s'exclamer ? Ni Philippe Delerm. Oh quelle belle idée... Aurélie Filippetti n'osera sûrement jamais présenter un manifeste de l'édition française, même s'il serait sûrement édité par la maison Gallimard, avec même une compilation des plus belles envolées du patron sur le sujet.
L'édition française semble tellement figée... qu'on dirait la France d'avril 1968. Sa logique de regroupement lui permet de s'aveugler sur l'impasse fondamentale d'avancer sans se soucier de la réalité de la vie quotidienne des écrivains. Gallimard en rachetant Flammarion boxera dans le top 3... mais ces gens-là ne voient pas venir ce manifeste, même s'ils pensent nécessaire de discréditer l'auto-édition, une tâche pliée en quelques mots.
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